J’ ai lu que serais-je sans toi de Musso et, s’ il existe comme l’ affirment certains un style Musso, je ne lirai peut-être plus Musso.
Ce qu’ il raconte n’ est pas du tout ennuyeux, j’ ai même parfois été happé par l’ histoire. Trop heureux de critiquer l’ auteur avec un « ah, ça tient pas la route ! », j’ ai vu en quelques pages les morceaux de l’ intrigue s’ emboîter, et, par exemple, la rencontre cornellienne entre le flic amoureux Martin et le père Archibald (voleur de haut vol), d’ abord invraisemblable, « convainc ». Idem pour cette relation asymétrique ou non-relation père-fille, qui se résume jusqu’ aux 34 ans de Gabrielle à une apparition travestie d’ Archibald le jour de son anniversaire. Alors, pourquoi Musso m’ énerve-t-il ?
Parce que Musso est un « faiseur » de best seller. Il n’ écrit pas avec ses tripes, il écrit pour vendre. Je suis persuadé qu’ il pourrait « élever » sa prose et donner à ses personnages plus d’ épaisseur. Mais il préfère cultiver sur un terrain moins littéraire, plus lucratif.
Alors Musso tombe souvent dans la facilité. Indigestes ces descriptions de lieux qui prennent la forme d’ une banale liste sur le mode énumération, et rasoirs certains clichés. Sa vision du coma par exemple (avec cartes d’ embarquement non nominatives estampillées »vie » ou « mort ») est un peu fade et, dans son univers entre vie et mort, j’ ai failli entendre « What else ? ». Enfin, l’ auteur semble avoir mis en place une « grille », un « gabarit » d’ écriture, qu’ il respecte scrupuleusement à chaque page. Chaque personnage se lève, roule en voiture et s’ endort, avec un morceau de musique parfaitement adapté à ses émotions de l’ instant.
J’ imagine Musso, avant d’ embrasser sa carrière d’ écrivain, posé à sa table de travail entrain de définir méthodiquement ses lecteurs potentiels. Il faut ratisser large, alors il faut une belle histoire d’ amour, il faut un cadre-carte-postale qui fasse rêver, et il faut de l’ action. Voilà Musso tirant avec brio les ficelles de son succès, à la conquête des âmes fleurs bleues, des voyageurs trop fiers de reconnaître les incontournables sites de leur dernière expédition, et des réalisateurs en mal d’ inspiration prêts à surfer sur un succès en librairie.
Embrasser les Arlequins et les guides de voyages, viser les droits cinématographiques. Recette Musso suivie par un gars qui a du talent.